Entre silence subi et silence volontaire. Lecture politique des mondes sensibles d'une ville coloniale, Lourenço Marques (Mozambique), années 1940-1975
Didier Nativel  1, *@  
1 : Centre d\'études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques  (CESSMA UMRD 245)
Institut de Recherche pour le Développement, Institut National des Langues et Civilisations Orientales, Université Paris Diderot - Paris 7
Université Paris Diderot, Bâtiment O.de.Gouges case postale 7017, 75205 Paris CEDEX 13 -  France
* : Auteur correspondant

Le principal journal à portée anticoloniale de Lourenço Marques s'appelait O Brado africano (Le cri africain). Ce « cri » n'a jamais entièrement été étouffé par les censeurs portugais. Il a nourri les revendications d'associations de la partie indigène de la ville (surnommée Caniço) comme l'œuvre de poètes, plasticiens et photographes. En 1965, peu de temps avant sa fuite de la colonie pour rejoindre le FRELIMO (Front de Libération du Mozambique) en exil et en lutte, Armando Guebuza, jeune nationaliste en colère et futur dirigeant de premier plan, a voulu briser un silence subi en dénonçant la situation d'oppression quotidienne vécue par les habitants du Caniço. Le journal local où il s'exprima, fut très vite interdit. Pour beaucoup de colonisés de la ville, la période d'intense répression qui démarre alors (l'usage de la torture se généralise), correspond à l'entrée dans une phase marquée par la prudence dictée par la peur. Mais comment précisément le silence a-t-il alors été investi ? À partir de sources multiples (archivistiques, entretiens, œuvres), cette intervention vise à proposer une analyse d'histoire urbaine et sensorielle de la fabrique coloniale du silence et des ripostes qu'elle a suscitées.

 

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Notice biographique

Professeur d'histoire de l'Afrique à l'université Paris Diderot, Didier Nativel analyse depuis une vingtaine d'années la trajectoire de villes et de sociétés urbaines de l'océan Indien occidental et d'Afrique australe. Son volume inédit de HDR a porté sur une histoire sensorielle des formes urbaines de la domination coloniale à Madagascar et au Mozambique.

  • La ville sensible coloniale à Madagascar et au Mozambique (fin XIXe -années 1970), HDR, vol. 2, Paris Diderot, 2013.
  • « Mondes sonores et musiciens des quartiers périphériques de Lourenço Marques (1940-1975) » in F. Rajaonah (dir.), Cultures citadines dans l'océan Indien occidental (XVIIIe- XXIe). Pluralisme, échanges, inventivité, Paris, Karthala, 2011, p. 235-255.
  • « Ségrégation, répressions politiques et culturelles à Lourenço Marques (des années 1940 à 1975) », in C. Chanson-Jabeur, A. Forest, P. Morlat (dir.), Colonisations et Répressions, XIXe-XXe, Paris, Les Indes Savantes, 2015, p. 429-446.

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